Train Nouadhibou/Zouérate
Mauritanie - Décembre 1999
 
Je voulais aller dans le désert, voir les vrais chameaux (dromadaires, je sais) et j'y suis, en plein dedans, goûtant l'hospitalité des gens du désert. Mais Revenons au train.
Ce train que j'avais longuement imaginé, je savais que ce ne serait pas une promenade, rien qu'à le voir passer la veille en arrivant à Nouadhibou, déluge de ferraille et de poussière, baigné dans un énorme vacarme.
C'est le train de la SNIM, la grosse mine de fer du pays.
Il achemine le minerai de Zouerate où se trouve la mine, vers le port de Nouadhibou pour charger les bateaux. Tous les jours à 15 heures il part de Nouadhibou, vide, pour arriver à Zouerate vers 6 heures du matin.
C'est soi-disant le plus long train du monde (ô fierté) avec ses 250 bennes à minerai, on peut embarquer des voitures aussi.

C'est au moment de monter dans le train que je rencontre Salem, c'est la cohue, puis la bagarre pour rentrer dans l'unique wagon passager.
J'ai raté une belle photo, tout le monde veut passer par la porte, alors ça crie ça pousse, ça s'arrache, les enfants volent, passent par les fenêtres; tandis qu'une grosse noire découvre un sein dans la bagarre, d'autres veulent faire passer une cantine par-dessus les têtes. Un militaire se fait engueuler par un supérieur. J'essaie de me lancer, j'arrive au marche pied, pas la place pour plus d'un pied et d'une main sur la rampe, penché en arrière avec le sac sur le dos je suis foutu, des femmes passent sous mon bras et me voilà éjecté.

Salem m'appelle, il est passé de l'autre côté du train, curieusement il n'y a pas grand monde de ce côté, on réussit à entrer dans le couloir, à la porte des chiottes qui puent, je m'imagine passer le voyage ici, un gars comprimé entre les bagages sous ses pieds et le plafond qui l'obliqe à se courber en deux donne un coup de coude dans le néon du plafond et le casse, il se blesse. Et ça gueule, et ça gueule, surtout les femmes.
On réussit à se casser, sauter du train qui va bientôt partir, on court le long des bennes pour s'en trouver une de libre. On grimpe dedans, jette les sacs et présentations dans la benne, le train s'en va.
3 heures là-dedans, et même pas envie de gerber.
Le train ralentit parfois, sans s'arrêter, mais il est parcouru de fortes secousses imprévisibles (pour le profane que je suis) d'avant en arrière, c'est le changement des vitesses de la locomotive.
On décide finalement de changer de wagon en marche parce que le prochain arrêt est à une heure du matin, intenable. Vite fait, bien fait, dans une période de ralentissement. Le nouveau est plus stable, on peut parler et presque jouer au carte, nous voilà en première classe.
"On ne dort pas la nuit" me dit Salem, il y aurait des vols, le train est réputé. Pipot ou pas on a pas trop dormi à cause du froid, et le lendemain les gendarmes ont arrêté un gars qui avait piqué la caisse du contrôleur, lequel ?

On a mangé des olives et du thon, du pain et des gâteaux, le tout soupoudré de sable.
J'avais prévu de m'arrêter à Choum (en guise de gare trois voitures dans le nuit) pour aller à Atar, mais je continue à Zouérate, chez Salem.
Le froid, le vent glacial, le sable partout, le sol en fer dur et glacé, et le froid surtout, on a passé la nuit recroquevillé dans un coin à attendre, attendre.
Arrivé à 7 heure chez Salem, présentations et deux heures de glande à la gendarmerie pour m'enregistrer.
Salem a quatre frères et trois soeurs, c'est l'ainé. J'ai été accueillis comme un fils chez les Tuenzis, et je leur en suis très reconnaissant, je retourne d'ailleurs les voir bientôt.
Le lendemain on est parti en brousse (c'est à dire dans le desert) avec Ali, un pote à lui, mécanicien à la SNIM.